
|
RANCON LA GALLO-ROMAINE
De RONCOMAGUS aux temps modernes. Scénario pour deux millénaires de vie dans les restes d'un décor. Jean Régis PERRIN |



|
Le plus bel ornement du vicus :
L'habitat colonial romain v , un vicus (bourg) de bifurcation routière - Roncomagus de
son nom antique selon toute vraisemblance - se créa en
plusieurs blocs jointifs d'habitations, sur un haut replat
aménagé surplombant la rivière.la route antique Garanti à l'est par un profond ravin, (St Sulpice) l'agglomération antique s'ouvrait à l'ouest sur une légère dépression qui se formait dans la pente et qui entraîna la voie romaine majeure (tracé rouge) vers la rive gauche de la Gartempe qu'elle abordait perpendiculairement au fil de l'eau, selon la meilleure tradition romaine. Dans une prochaine page nous la retrouverons outre-Gartempe, à l'assaut des Côtes-du-Merle puis de la Côte-Loube jusqu'au Clops de Villefavard. De la petite ville antique, il nous reste des traces sur nos photographies : un dessin de rues tirées à l'équerre v sur fond de terres revenues depuis plus d'un millénaire à l'usage agricole, près du cimetière actuel, au milieu du cliché. Mais les habitats antiques pouvaient encore s'étendre à l'ouest , au-delà de la voie. Le morcellement des jardins actuels pourrait être un reste de lotissements plus aristocratiques dont les limites présentent encore une forte tendance à s'orienter en éventail, perpendiculairement à la courbe de la route antique : voir nos photos tant obliques que verticales.
Dans ce plan, une entité carrée présentant une excroissance à l'ouest, plus lourdement délimitée était peut-être le forum f , en limite de la voie principale que nous appellerons désormais la voie du vicus. |
![]() |
|
Ailleurs, au-delà de la limite haute du vicus,
comme il seyait déjà à un établissement de
jeux, un socle rocheux sporadiquement colonisé par les ronces et les orties, au fond d'une cuvette, n'en finit pas
de s'amenuiser à chaque labour : la
scène d'un possible théâtre rural qui fut sans
doute très fruste t , près du monument moderne de la Croix-Pierre (rond blanc).
Deux cent cinquante mètres plus bas, revenant vers le bourg actuel, une rue transverse supportait dans la première moitié du XXe siècle, le chemin de fer du tramway départemental. Cette rue marque toujours la limite sud de l'agglomération de Rancon et la gare avait été établie ici précisément et par le plus grand des hasards, sur le passage de la voie romaine. Lors des travaux d'établissement de la ligne il fut découvert à cet endroit précis un cimetière antique à incinérations (urne ignée) : on mourait déjà beaucoup sur les routes il y a 2000 ans. Une autre voie romaine
L'érudition
actuelle, arrivant de Limoges / Augustoritum par des chemins toujours aussi incertains, reconnaît cependant - et à
juste titre - la première partie de la rue dite de la
Croix-Pierre (rond blanc) comme un parcours périurbain antique. Un axe qui
amorçait
déjà à cette époque, un
itinéraire
important dont la trace s'est maintenue jusqu'à nos jours en dépit
de tribulations moyenageuses.
Cette vocation ainsi bien amorcée, s'est maintenue jusqu'à l'actuelle rue des Marchands-de-Vin : mais faute d'une enquête de terrain méticuleuse, notre histoire locale s'est arrêté là. Car il devient de plus en plus évident que nous devons élargir notre vision et ne pas nous focaliser sur de courtes anecdotes si l'on tient à approcher Rancon dans sa pérennité depuis les temps antiques. Et la leçon concerne tous les sites archéologiquement sensibles dont Chassenon que nous allons aborder bientôt. Pour la tradition savante d'aujourd'hui, arrivant sur la vaste place centrale de Rancon, la voie de la Croix-Pierre perd son statut et devient tributaire de l'ancienne "rue Grande" devenue rue des Marchands-de-Vin .
Tout est possible, mais il ne faut pas s'arrêter là !
Traversons l'espace qui nous sépare de l'église et poursuivons sur cet axe jusqu'au grand chêne qui marque la fin de l'esplanade de l'ancien cimetière qui porte encore sa lanterne des morts. On se retrouve alors en surplomb d'une tranchée routière qui fut taillée à l'antique dans la pente, en direction du vieux pont et sur l'alignement en longue courbe entretenue depuis la bifurcation de la Croix-Pierre, là-haut, à plus de 500 mètres de nous, au sud (tracé orangé). Transitant par l'emplacement de l'église actuelle ayant succédé (par étapes) à un hypothétique sanctuaire du culte païen (au lendemain de l'avènement du christianisme), nous appellerons ce nouvel itinéraire : la voie du sanctuaire. |
| Cette seconde voie issue de la
bifurcation haute de la Croix-Pierre, passait la Gartempe à
gué ou à bac voire sur un pont rustique de
madriers portés par de lourdes piles, bien antérieur au
vieux pont actuel. Elle abordait alors immédiatement et en droite ligne, la forte montée antique du Plirot pour un parcours compliqué vers Magnac-Laval. |
|
Les routes issues de l'espace gaulois traditionnel,
les petites voies de liaison et d'échange.
Conformément à ce que nous ont appris de longues heures de vol sur la campagne limousine, nous
n'oublions pas les voies issues de l'espace
gaulois - probablement "romanisées" sinon elles seraient
invisibles - qui se perpétuaient
ainsi sur le versant de la rivière
depuis Châtres et Mérigot.
Formant un tronc commun à l'orée du vicus, elles se différenciaient à nouveau pour offrir un choix vers l'un ou l'autre des deux passages d'eau sur la Gartempe où leurs tracés jaunes finissent par aboutir. Dans cette optique,
notre flèche jaune de gauche marquerait
un intérêt particulier pour la liaison vers le gué du vicus
: ainsi aurait pu s'amorcer la pérennité de la
"rue Grande", la rue des "Marchands-de-Vin" d'aujourd'hui : notre image verticale ci-desus, Rancon antique.
Notre méfiance naturelle cependant nous incite
à penser que cette courte opportunité ne fut pas
suffisante pour justifier l'importance prise par cette rue maitresse dans
l'agglomération actuelle de Rancon.
Nous suggérerons mieux ci-dessous : un avatar survenu 1000 ans plus tard, porté par les arcanes d'une l'histoire féodale à peine postérieure à l'an mil. |
![]() |
| Nous ferons encore état plus loin, d'autres petits chemins de liaison qui apparaîtront évoqués par de courtes traces mais fortement appuyées par les nécessités journalières de la vie antique et médiévale. |
|
Car il arriva qu'en
quelques siècles "la
Paix romaine" s'épuisa
confrontée à l'instabilité causées par les
grandes invasions auxquelles se joignait l'inexorable
déliquescence d'un Empire trop vaste et miné de
l'intérieur.
Dès avant sa chute peut-être, ce fut le commencement de la fin : l'agglomération antique et la voie monumentale qui passait à son pied et qui s'étaient maintenues jusque-là sous la tutelle d'une gestion romaine rigoureuse, devinrent progressivement - tant par les exactions que par l'incurie - un champ de ruines : un espace qui se vida progressivement de ce qui restait de sa population, qui se déplaçait instinctivement vers l'ouest et la protection espérée de l'autorité écclésiastique. Là-haut cependant, au sud, à l'entrée de l'ancien vicus , une route récupérant ce qui restait de la voie disparue et prenant du champ avec les ruines, tenta
de rétablir le passage en direction de l'ancien gué du vicus sur
la Gartempe.
Bout à bout, trois rues actuelles nous restituent avec une certaine
vraisemblance ce nouveau tracé urbain : le haut de la rue de la Croix-Pierre, la rue des
Fossés et le bas de la rue des Marchands de Vin.
Sur notre photo synoptique, la rue des Fossés marquée par de courtes flèches jaunes, figure comme un petit itinéraire de liaison et de contournement. On la retrouve ci-dessous plus nette ou vue en enfilade, sur nos 2 clichés, l'un oblique fichant l'autre vertical, ci-dessus. |

|
Cette photo, c'est Rancon avant la
construction du nouveau pont sur la Gartempe, le Rancon des derniers siècles .
Rancon
uniquement relié depuis des temps immémoriaux aux pays du nord par l'unique vieux pont du
XIème siècle,
ouvrant sur des itinéraires
compliqués hérités du Moyen-Age.
Même le plan cadastral de 1828 qui figure ci-dessous, accuse tout à la fois la présence solitaire du vieux pont,
en même temps que la désuétude de l'ancien gué du vicus. Les photos qui nous entourent, accusent encore et impitoyablement, l'irréalisme et l'inadéquation du projet routier contemporain.
Orientées l'une et l'autre sensiblement
vers le nord, elles montrent le petit bourg axé sur une rue principale imposante -
la rue des Marchands-de-Vin anciennement la "Rue-Grande" - qui le traverse du sud-ouest au nord-est.
Mais qui s'interrompt à quelques dizaines de mètres de la
rivière Gartempe,
à hauteur d'une ancienne ferme devenue à ce jour une "brocante". Car il arriva qu'un jour, le gué du vicus romain ne fut plus utilisable . |
|
Le silence des documents
écrits - de l'époque antique au moyen-age -
interpelle le chercheur imaginatif. Une réponse
pourrait nous venir des documents imagés qui
témoignent à leur façon que la tutelle romaine et
sa haute ambition civilisatrice était irrémédiablement et depuis longtemps révolue.
Car le vieux cadastre illustre bien la fin
"en queue d'anguille" de cet itinéraire qui fut un jour interdit et supprimé de façon drastique et irrévocable, par une autorité féodale soucieuse
de drainer au plus près de son contrôle des péages qui chaque jour, lui échappaient. |
![]() |
| Mais il faudra attendre l'aube du XXIe siècle pour qu'un pont moderne
soit construit ici, enroché sur une solide tombée
d'interfluve venant des Bosnages : car les romains n'avaient pas posé
là un gué
par hasard, à deux pas de leur ville nouvelle ! |
| Dès lors, est-il besoin de se faire urbaniste ou architecte paysager (?) pour suggérer un enchainement de
faits concernant la génèse de ces images que rien -
hormis une certaine expérience décomplexée - ne
vient facilement éclairer. Il faut se rendre à l'évidence, après la chute de l'Empire romain, l'attirance conservée du gué du vicus desservant les pays du nord-nord-est par le Clops de Villefavard, avait permis, contournant opportunément pendant quelques siècles les ruines de l'ancienne voie romaine, la persistance voire le développement de cet axe de circulation privilégié. Mais on constate par l'ancien cadastre de 1828 l'interruption - très ancienne par sa configuration - de tout trafic causée par l'effacement flagrant à cet endroit, de l'accès à la rivière et l'absence de toute sortie décelable sur l'autre rive. On en déduit que tout le trafic des voyageurs traversant le bourg avait dû un jour, se rabattre sur l'autre voie romaine (celle du sanctuaire païen ou de l'église) qui s'était maintenue depuis sa création antique jusqu'au passage de la Gartempe à l'emplacement du vieux pont actuel. |
Les taxes que l'on pouvait tirer des voyageurs désirant passer l'eau, ne furent pas étrangères à l'initiative d'un seigneur qui installa peu avant l'an mil, son château féodal sur un éperon dominant la Gartempe (surimpression verte).
Un gué antique proche de l'ancien vicus des romains,
était dès lors loin du château et difficile à surveiller :
il permettait à certains voyageurs d'échapper aux péages.
Alors il est
probable qu'il fut interdit d'usage et dans la dernière pente, sa voie d'accès fut définitivement arasée et détruite.
Le gué d'aval - sur la voie jalonnée jadis par un ancien sanctuaire païen maintenant christianisé en église paléochrétienne
- placé
directement sous l'oeil du seigneur-
fut dorénavant le seul passage d'eau accessible et autorisé. Après avoir été un
gué ou un bac voire un pont très fruste de madriers
portés par des piles de maçonnerie
récupérées de l'antique, le vieux pont
d'aujourd'hui fut bâti :
beaucoup de temps s'était écoulé depuis les romains, c'était déjà le XIe
siècle.
|

| L'histoire savante nous paraît bien silencieuse
au sujet de la tutelle que les seigneurs du lieu pouvaient exercer sur les habitants du village médiéval. Et quelle part pouvaient en exercer les autorités ecclésiastiques ? Quelles querelles de suprématie ont pu se faire jour durant ces 500 ans d'histoire bruyante et furieuse de la chute de l'Empire romain jusqu'à ces lendemains de l'an mil ? Et si l'autorité religieuse lassée du passage exclusif et contraint des voyageurs et des gens de guerre, avait décidé de ne plus supporter les nuisances dues à la convergeance de deux itinéraires très fréquentés au pied de sa nouvelle église du XIe ? - Quelle irritation aurait pu générer la cupidité d'un seigneur
du XIe siècle, qui avait manu militari,
asséché le trafic de cet ancien gué qui
faisait autrefois l'ornement du vicus romain, en détruisant ses
accès, pour drainer plus sûrement la circulation au pied de sa tour, vers
ce pont qu'il venait de faire construire - sans doute au dépens des ruines romaines - et
récupérer ainsi plus sûrement les
péages de cet unique passage d'eau ?
- N'y aurait-il pas eu alors, une tentative d'embargo de l'autorité
ecclésiastique excédée qui au prétexte d'édifier un saint
aménagement (le vieux cimetière du XIIe siècle et sa lanterne des morts), aurait déversé ici des
tonnes de remblai, espérant en sous-main éloigner le passage voire priver le
château des péages
espérés . . .
. en arrêtant le trafic de la voie "secondaire" venant de
la bifurcation de la Croix-Pierre et transitant par l'église, . et arrêtant du même coup les circulations venant des hauteurs de Châtres et de Mérigot ?
Car nous ne rêvons pas , c'est bien la
tranchée d'une relique de voie antique qui surgit sous le talus de l'ancien cimetière à hauteur
de la chapelle Saint-Sébastien -
elle-même à moitié enterrée sous le remblai ! Une tranchée
routière vieille de 2 millénaires, taillée à l'antique - en auge de maçon -
et qui s'aligne depuis toujours sur le passage d'eau encore occupé de nos jours par le
vieux pont du XIe, le pont du seigneur !
Cela fait bien 1000 ans que cette vénérable relique de chemin antique, décaissée dans la pente, ne sert plus à rien sans que jamais depuis ce temps, personne ne se soit apparemment intéressé à elle. |
| Après avoir "rassemblé" sans
difficulté dans la "rue Grande", tout le trafic arrivant du haut des terres par les voies du sud, plus ou moins héritées des romains . . . il "rabattit" tous ces voyageurs vers une bretelle de liaison qu'il créa et qui est connue de nos jours encore, sous le nom de "Chemin des Soeurs". Le système se devant de fonctionner dans les deux sens et si ce n'était déjà fait auparavant, (et pour ne pas se priver de certains péages,) le seigneur fit établir sur l'autre rive une voie vers la droite - une voie sur berge - remontant la rivière au pied des côtes rocheuses, pour désenclaver l'ancienne voie de Villefavard par les Côtes du Merle. Mais çà, aucun ingénieur romain ne s'y serait jamais risqué au nom de la sacro-sainte doctrine du Génie des Légions : on n'établissait jamais une voie romaine le long d'un tombant abrupt et qui plus est, parallèle et à quelques pas d'un cours d'eau. C'est bien la preuve que l'on avait changé d'époque. Dans notre hypothèse, nous n'avons pas envisagé qu'il ait pu y avoir connivence et partage d'intérêt entre les autorités exerçant peu ou prou, une tutelle sur le territoire de Rancon. |
| Puis il arriva, à une époque incertaine mais sans doute tardive, les temps
étant peut-être devenus moins rudes, pour les besoins de tous les jours, que quelqu'un eût l'idée de remettre en service le vieux gué des origines romaines, qui manquait aux voyageurs qui voulaient faire route directe vers Villefavard. Mais sur la rive trop pentue, l'ancienne voie ruinée naguère par le seigneur, n'existait plus et les terrains avaient peut-être été depuis longtemps accaparés. De quelques cailloux roulants
qui restaient encore, on organisa un mauvais chemin étranglé
qui remontait la
rivière sur une centaine de mètres
jusqu'à atteindre la rive par une pente moins abrupte. (Tracé jaune ci-dessous)
Les 2 parcelles d'atterrissage du
nouveau gué et quelques autres en arrière, furent tout
naturellement désignées
par extension, sous le toponyme "le gué ".
|

| Car il est tout à fait évident qu'il ne faut en aucune façon porter au crédit des romains le passage d'eau illustré ci-dessus par l'ancien cadastre, et que nous surchargeons en jaune, cette figure étant en total porte-à-faux vis à vis de l'alignement scrupuleux des voies de l'époque antique. Une solution indigne d'un ingénieur romain, imprégné d'une doctrine routière autrement rigoureuse . |
|
Le gué nouveau ou la leçon du vieux cadastre Le cadastre de 1828 ( voir ci-dessus ) nous signale en effet que ce toponyme existait déjà en aval du nouveau gué, qualifiant pour le moins 3 parcelles de rive qui correspondent à l'espace qu'occupait le gué des romains dont nous pensions que tout souvenir avait définitivement disparu !
Ce gué romain des origines qu'aucun historien - à ma connaissance - n'a jamais évoqué et
qui fut détruit
et effacé il y aura
bientôt mille ans, par la cupidité d'un seigneur
mais que
trahissent encore des signes sur le cadastre de 1828.
qui suscite une constante, forte, persistante et finalement mythique connotation antique. Par manque d'expérience du terrain mais en toute bonne foi hélas - n'en doutons pas - les cénacles savants ont ainsi gratifié d'une origine romaine ce chemin étroit et tordu, aussi chantourné et malaisé que possible. Et l'antiquité usurpée de l'ouvrage persiste aujourd'hui. Les publications récentes - faute de s'être laissé guider par l'humble lecture du terrain et les sources imagées disponibles depuis plus d'un siècle - professent toujours cette antithèse d'histoire ( documents cadastraux ci-dessus). On peut également se permettre d'ignorer, l'hypothèse à peine moins pire - mêmes causes, mêmes effets - qui ferait transiter la vénérable voie par le ravin de St-Sulpice ! ( T.A.L. 2002 ) Pour en revenir aux signes ténus qui peuvent ici ou là, faire dresser l'oreille au prospecteur curieux, je note pour la seconde fois * que certains " lieux-dits "
s'enracinent dans une anecdote
* Site "limousin-archeo-aero". Page :
Itinéraires de l'ouest et du sud-ouest. Paragraphe : "La
voie précoce par le gué du Haut-Verthamont".si mince et si anodine qu'aucune résonnance sérieuse n'en a été reprise par l'érudition. Mais on doit reconnaître que de temps à autre, l'origine d'un nom puisse arriver à notre entendement comme la manifestation d'un inconscient populaire rampant qui ne s'exprimerait plus ouvertement mais dont cependant le fil n'aurait jamais été véritablement rompu. C'est ainsi que peuvent s'exprimer utilement des remarques apparemment anodines. Un coup de chapeau au graphisme méticuleux de Monsieur TOURNIOL, géomètre de 1ère Classe, qui termina le tracé du premier cadastre de Rancon le 5 xbre 1828. |

A / L'attelage
Les animaux de traction attelés en couple, sont
des équidés partout où le document est lisible
à cet égard : des mules (1 et 4) ou des chevaux (2
et 6, ?) .
Ils
sont saisis par la tête, solution anatomiquement
inconfortable pour la bête et peu efficace pour exercer un effort
- pour autant qu'on puisse en juger puisque cette pratique n'existe plus depuis très longtemps.
La transmission de l'effort s'exerce par des brancards sur les documents 1 et 4. Remarquons cependant - en récusant tout "finalisme" - que les équidés se sont toujours fait une place parmi leurs semblables par l'attaque et la défense essentiellement exercés avec leurs sabots. Aucun atavisme n'intervient sur ces animaux pour qu'ils se comportent naturellement autrement, à part peut-être le "fouetté" de la tête qui peut être ravageur pour l'adversaire. A l'inverse, les bovins dont la force est captée sur la tête par un joug que l'on rend solidaire de l'animal par des sangles (les "juilles" ou "jugles" ,du latin jugulare, jugulum ?) assujetties aux cornes et passant de surcroît sur l'os frontal de l'animal, constituent un dispositif très performant. La vache, le boeuf affirmant naturellement leur place dans la hiérarchie bovine par des joutes d'affrontement musclé - tête contre tête, corne contre corne. |
![]() |
|
On constate une variante par
défaut, sur le document n° 2 : le lien avec le
char doit s'effectuer par un timon qui passe entre les deux
bêtes. Ici, détail notable, " la prise de force"
s'effectue par un joug d'encolure anatomiquement adapté pour
soutenir le timon mais beaucoup moins pour exercer une
traction. En effet, une large sangle qui retient le
glissement du dispositif vers l'arrière est nécessaire. Elle doit
inévitablement remonter vers la gorge de l'animal quand il
exerce un effort vers l'avant et provoquer un étranglement.
Une sangle sous-ventrière figure sur le document 4 : son adaptation au cas de la figure 2 aurait peut-être apporté un léger mieux mais le dispositif ne brille pas par son efficacité. Par ailleurs, aucune sangle ne passant derrière les cuisses de l'animal
(l'avaloire), il peut difficilement ralentir la vitesse du charroi ou faire
marche arrière.
Aucun des cas
relevés - même l'attelage par collier des boeufs - ne montre une réelle efficacité.B / Le char Tous les chars à 2 essieux représentés montrent des roues d'avant-train dont le diamètre est supérieur à l'espace libre sous la plateforme du chariot. Si tant est que l'avant-train ait été prévu pour pivoter, il ne pouvait le faire que de quelques degrés avant que les roues ne frottent et se bloquent sur les limons de la plateforme. D'où la longue et lente flexuosité des voies romaines ? Ainsi que les raccordements souples aux carrefours et aux embranchements ? En conséquence de quoi l'accès au nouveau gué représenté par le cadastre de 1828, ne peut être que très postérieur à l'antiquité. Le temps pour les héritiers des gaulois (excellents charrons dit-on) d'enseigner aux descendants des romains l'usage du collier d'épaule. Quant aux chars à deux essieux, il faudra attendre les chevaux-vapeur pour en arriver aux subtilités de "l'épure de Jeantaud" ! Mais force est de constater qu'au Ve siècle encore (reproduction n° 8), peu de progrès auront été faits si ce n'est la possibilité pour le train avant de pivoter éventuellement sous les limons et l'adoption de la bricole ou collier de poitrail, qui sera conservée par les militaires jusqu'au milieu du XXeme siècle en raison de son adaptabilité à toute morphologie animale. D'autres questions demeurent sans réponse : - essieux métalliques ou essieux en bois dur ? - Clavettes d'extrémité d'essieu pour faciliter le démontage du char (ruptures de charge en cas de très forte montée) ? document 5. - Aucune figuration d'un dispositif de freinage, mais évocation d'un possible dispositif d'enrayage (frein de parc) ? : document 3. Enfin il arriva un jour où le commerce et l'agriculture adoptèrent le collier d'épaule. Avec le gouvernail d'étambot sur mer, ces deux inventions majeures devinrent les symboles forts de notre entrée dans les temps modernes. |

| Et voilà pourquoi,
malgré son importance modérée si on
se réfère seulement à l'époque romaine tardive,
la Rue-Grande mérite finalement bien son nom dès lors que l'on prend en compte les tribulations de la féodalité. Instituée par la volonté d'un seigneur, comme unique lieu de transit à travers le bourg pour donner accès à un passage d'eau unique, elle s'est finalement maintenue durant mille ans jusqu'à venir à notre époque envers et contre toute logique qui expliquerait autrement sa forte
assise
Il y a là à n'en pas
douter, les restes d'une opportunité historique qui n'aurait
jamais été décelée ni formulée.profondément désaxée, dans l'agglomération actuelle. |
![]() |
|
Vu d'en haut, vu d'en bas,
RANCON |


| Nos photos aériennes témoignent que la grande voie de Limoges à Rancon et autres lieux lointains, oeuvre des routiers
romains, descendant des hauteurs de la Goutte, venait directement à la rivière pour passer
l'eau magistralement au pied du village romain et juste en face d'un
tombant rocheux qui garantissait un passage sur une roche solide : sauf cas de force majeure ou bévue inexcusable, on ne créait pas un gué sur un fond vaseux. La grande voie remontait alors le versant nord de la Gartempe par les Côtes du Merle, puis contournait (prudemment ?) une zone agricole gauloise (Les Chômes) à hauteur de l'ancienne Tuilerie de Roche. Elle entaillait plus loin, au nord, une rive de la Semme (La Côte-Loube) pour amortir sa montée jusqu'au Clops de Villefavard . . . Nous la retrouverons dans une prochaine page. |
|
La voie du sanctuaire
Ses plus beaux ornements furent successivement un édifice rituel : sanctuaire païen puis une première église et enfin et possiblement, un pont. Et après la rivière ce qui fut une manifestation démesurée et un rien arrogante
de la haute et téméraire technique des romains : une large voie qui escalade la pente à fond de tranchée, la montée antique du Plirot !
Le
Plirot est un ravin sec, sans doute légèrement aménagé
à l'époque antique pour porter une route comme
seuls les routiers romains, totalement étrangers à la mollesse
aussi bien qu'aux humeurs du voyageur,
pouvaient en imaginer.
|
![]() |
|
Une route bien alignée sur la ligne
de
plus grande pente : une pente raide comme l'injustice et tirant au plus
court vers le nord et une destination lointaine inconnue.
Une route de militaires pis, une route de Légionnaires : "Marche ou crève !" mais attention, dans l'efficacité pour ne pas dire dans la délicatesse avec des amortissements souples aux ruptures de pente et de longues courbes pour ménager les attelages et les cochers avant d'attaquer le haut passage d'interfluve entre Gartempe et Semme. En matière de voirie les romains vont rechercher la ligne tendue - et nous savons désormais pourquoi - au lieu et place de la ligne droite, idéale mais impossible à tenir en Limousin. (voir les photos verticales et obliques précédentes et notre tableau des chars et attelages) |

|
Quand au statut de ce passage d'eau on peut
toujours rêver quant à son origine : cela pouvait aller d'un simple gué à un bac comme nous le suggère la vieille
borne à encoche d'une navette traversière laissée
là . . . en rive droite de la Gartempe.
Mais il aurait pu également s'agir déjà d'un pont avec, nous l'avons dit, une chaussée rustique portée par de lourds madriers posés eux-mêmes sur des piles massives de gros blocs appareillés. Mais la certitude
d'avoir affaire à une voie antique est confortée
par la tranchée routière qui entaille la haute rupture de
pente que nous illustrons ci-dessus, ainsi qu' à hauteur des Bosnages, par des restes
de parcellaire qui dessinent une chaussée avec ses larges bas-côtés.
A peine plus loin, près du village de Villenue, nous intercepterons dans le droit fil de notre progression et sur plus de cent mètres, l'image "pharaonique" d'une voie de largeur inattendue. Mais cet antique passage de la Gartempe avait certainement d'autre débouchés : sitôt passé l'eau et délaissant la montée du Plirot, le voyageur pouvait appuyer à gauche ( revoir notre photo aérienne oblique) et emprunter un court mais profond chemin qui tranchait le pédoncule d'un promontoire rocheux (la route moderne le contourne aujourd'hui) : un raccourci vers un très vieil itinéraire vers de lointaines contrées de l'ouest. Nous en rappellerons le passage dans une prochaine page sans pour autant avoir étudié ce parcours. |
|
Mais revenons d'abord sur les
aménagements de voirie et les accès à
l'agglomération tant anciens qu'actuels , dont nous
avons commencé de débattre à la page précédente.
Résumons : la route de la Goutte qui nous arrive de Limoges/Augustoritum par Les Voyounes, est irrécusable en tant que voie antique majeure. Non loin
à
l'ouest, l'ancien chemin qui descend de Mérigot dans une large
ondulation suit la ligne de plus grande pente. Cela nous
incite à le considérer comme étant d'origine
également antique.
Propension renforcée par son rattachement à la voie principale de Limoges, par deux échangeurs en croix (voir page précédente "Voies convergentes . . .") mais également par son transit vers l'agglomération par un carrefour qui porte encore la croix d'une très ancienne "christianisation" témoignage d'un souci d'éradication du culte dédié précédemment à une divinité païenne. |
![]() |
| Au rang des détails infimes voire futiles, il est intéressant de reconsidérer
le chemin qui descend de Mérigot vers le site de Rancon. A
l'endroit où se détache le petit échangeur qui
remonte vers la Goutte, le chemin de Mérigot accuse une
légère inflexion. Observée dans un environnement sensible, cette simple anomalie valide la grande ancienneté de la bifurcation et son origine antique conservée intacte. Les chemins "recalibrés" en voies communales ou autres, ne transmettent plus ce genre d'anecdote. Il est tout à fait illusoire de penser instaurer ce genre d'observations en méthode de recherche : le XIXe siècle et le début du XXe ont beaucoup fait pour amender le marasme routier de l'Ancien-régime. Beaucoup de détails à valeur historique ont ainsi été effacés. De plus, on ne saurait tout voir et tout contrôler et ce qui reste est le plus souvent le résultat d'une situation loin de tout, en rase campagne. A cet égard, nos deux sites fourmillent de tels non-dits dont la description serait vite devenue fastidieuse. |

| Descendant de Mérigot jusqu'au carrefour christianisé le plus proche de l'agglomération,
une voie poursuivrait en contournant les sources d'un ruisseau (petit étang actuel) ainsi que le fait
aujourd'hui la route D 1. Ce faisant, nous avons l'embarras du choix pour l'inscrire dans le paysage actuel en négociant les traces perçues dans une prairie, l'implantation des bâtiments, les limites de jardins, le rebord du plateau avant le versant des ruisseaux . . . si bien que l'on pourrait retenir à quelques mètres près, plusieurs solutions parallèles, la plus évidente étant sans doute la plus directe quand on connaît la prudence du romain à éviter les dévers de pente et la proximité des terres humides des fonds de vallée. Cela nous amène - à travers des propriétés bâties actuelles ou sur leurs limites - à venir déboucher sur la courte rue qui longe en contrebas le terre-plein des platanes, au niveau de la rue dite des Andecamulenses. |
|
C'est ici que l'on peut le mieux observer le terte artificiel de
l'ancien cimetière qui fut créé à
une date fort ancienne et sensiblement contemporaine de la fondation de
l'église (XIIe siècle).
De cette terrasse dominant la vallée de la Gartempe et établie au plus près de l'église selon les usages de l'époque, il ne reste qu'une Lanterne des Morts, un monument funéraire typiquement limousin (surcharge jaune sur notre photo ci-dessous). On peut imaginer les voies antiques brutalement enfouies sous ce terre-plein. Leur assise commune à fond de tranchée, réapparaît aujourd'hui au pied de ce haut talus qui regarde la rivière. L'ancienne voie devenue dès cette époque sans intérêt pour les populations, émerge ainsi, non loin du chevet de la Chapelle St-Sébastien, elle-même partiellement engagée dans le remblai.
La résurgence routière se situe à moins de 10 mètres à droite du grand
chêne qui borde le haut talus.
|
![]() |
![]() |
Observez la photo que
nous en donnons ci-dessous : le
profil traversier du terrassement antique correspond bien à ce
que nous connaissons des chemins romains. Son profil en
auge de maçon suffit à
faire la différence avec les étroits chemins creux
agricoles,
affouillés par le ruissellement et le passage des animaux et qui
présentent des parois verticales, sensibles à
l'éboulement.
Son raccordement avec le chemin plus récent, venant du Moulin se montre nettement plus ouvert du côté droit en descendant. Ce simple détail morphologique maintenu au cours du temps, suggère qu'il y eut ici et tout à la fois, un prolongement direct vers le pont mais également une possible inflexion de raccordement au pied d'une nouvelle terrasse, vers le gué des origines, le gué du vicus. |
![]() |
|
Nous signalons
ci-dessous sur ce nouveau replat dans la pente et ainsi surélevés, deux enclos carrés de
tradition gauloise. Sur une parcelle voisine, d'autres
photos (mais on ne peut tout montrer) révèlent des
macules
foncés inégalement répartis, qui pourraient
correspondre à des dépôts d'incinération :
un autre cimetière en somme, à la sortie des voies vers le nord (urne ignée).
Ainsi, venant de la Goutte par le site de la Croix-Pierre et le sanctuaire païen des origines( plus tard église), on pouvait contourner le vicus antique de Roncomagus. Nous ne sommes pas loin de penser que cette configuration à deux voies (hors le cas d'une bifurcation au long cours comme ici), était une constante, s'agissant de vicus de quelque importance (voir Chassenon plus loin). |



|
Rappelons que les
premiers indices de la voie antique qui se dévoilent à
l'entrée sud du vicus antique consistent en un curieux
parcellaire de jardins en triangle très allongé dont la pointe - au nord - situe l'ancienne gare des tramways départementaux. La référence imparable fut la une
mise au jour en 1911 et à cet endroit, d'un
dépôt d'incinérations antiques (point rouge et urne
stylisée).
La
récupération et la mise en attente des pierres de la
chaussée antique et d'éventuels
édifices
attenants, se signalent de nos
jours tantôt par de forts amoncellements de pierres montés
sur place en murets monumentaux (photos
repérées 1 et 2 ci-dessous),
tantôt sur des sols agricoles totalement nivelés,
par de
subtiles marques dans les prairies et les cultures seulement
perceptibles par l'observation aérienne, au hasard
d'aléas climatiques extrèmement difficiles à
caractériser.
On peut cependant avancer l'intérêt de périodes de beau temps qui se prolongent jusqu'à ce que s'instaure dans des cultures sensibles (céréales), un commencement puis une évolution du déficit en eau. La constance à cet égard de vols répétés au long de l'évolution du schéma climatique permet généralement de faire des remarques pertinentes. Il faut savoir que dès le bas-empire - à partir du IIIe siècle - le lourd empierrement des voies antiques est vite devenu par absence d'entretien, un chaos rocheux impraticable à toute circulation. Et si une circulation a pu persister, elle s'effectuait sur l'un ou l'autre des bas-côtés autrefois dévolus au passage des piétons, des animaux de bât ou des troupeaux. Le processus a pu persister tant que la récupération des matériaux a présenté un intérêt pour les populations : les couches profondes d'assise et de drainage des vieilles chaussées étant sans doute particulièrement prisées. Le remplissage des fouilles par les déblais et la pierraille ne laisse subsister qu'un long cordon de matériaux fractionnés.
Ces anciennes tranchées maintenant remblayées par le tout-venant des rebuts, se
comportent toujours comme des réservoirs où l'eau de pluie
s'infiltre de façon privilégiée. Elle est non
seulement stockée à fond de tranchée mais aussi
animée d'un lent mouvement juqu'à une résurgence
possible au bas des pentes (pseudo-sources).
Ainsi, au
début des périodes de sécheresse, l'eau en
réserve à fond de fouille, s'élève
par capillarité jusqu'au niveau du sol en une cheminée affectée d'un
important "rétreint" dans son ascendance. La culture, la strate herbacée,
présentent alors un effet verdoyant accentué d'apparence
linéaire mais de largeur très inférieure à la dimension initiale des terrassements.
|
| Sur l'image témoin, on observera ce
phénomène sur une prairie largement
dégagée composée d'anciens jardins et vergers où la trace se déperche en
traversée de pente, sur l'arrière d'un hangar agricole au
toit gris (après le repère 2, ci-dessous) . Le lecteur attentif notera que des limites de jardins s'organisent en long ou encore perpendiculairement à la voie, dans l'espace situé entre la Croix-Pierre et l'abord du supposé forum. Ensuite l'époque médiévale a semé sa propre logique. Les images 3 et 4 illustrent l'aspect du terrain avant et après la ferme de la Brocante : mention spéciale pour une avancée de terrain établi en tertre entre le cimetière actuel et la voie antique. Mais le joli toboggan qui précède le gué sur la Gartempe pourrait nous tromper dans le détail. Nous aurions faire une visite rapprochée du site avant les travaux du nouveau pont mais notre projet n'était pas mûr. Rappelons qu'un chemin existe toujours à droite, juste avant l'ancienne ferme. Longeant les bâtiments, il vire ensuite à gauche vers la rivière et atteint finalement la berge : un aménagement chantourné aussi peu romain que possible (revoir le plan cadastral de 1828). Observons a contrario, que le gué antique était établi sur les derniers contreforts du promontoire du Plirot et que le ruisseau des Bosnages avait vu sans aucun doute, son embouchure reportée en aval, contournant le musoir rocheux. Etait-ce encore visible avant la construction du nouveau pont ? En 5, la voie antique sortie du gué en rive droite, empruntera une courte portion de la route de Roche avant d'attaquer la Côte du Merle : c'est une autre histoire pas forcément évidente non plus, que nous aborderons dans une prochaine page. |

|
C'est en tout cas
la première idée qui vient à l'esprit en observant
nos photos, vieilles de 20 ans faut-il le rappeler.
Il nous manque le nivellement qui aurait pu être apprécié en formant puis en observant des couples stéréoscopiques : j'avoue qu'à cet instant je n'y ai pas pensé, pas plus ici que plus bas, au long de la voie antique. Expliquons : la parcelle se signalait à l'époque par un délaissé de culture de forme ovoïde probablement dû à l'affleurement d'un socle solide construit. Au vu de l'emplacement et de la forme, on pouvait penser aux soubassements d'un podium, d'une scène. Restait alors à apprécier si les terres environnantes auraient pu convenir à l'établissement de gradins en surélévation. Il n'y a que l'enquête au sol qui puisse apporter une réponse . Observez à droite, la bande de terre en forme de boomerang qui calque sa courbure sur la route de la Croix-Pierre : surélevée de plus de 2 mètres, elle entoure et domine les restes supposés de la plate-forme ovoïde par la courte pente de sa face interne. L'autre
côté de la parcelle est moins pentue, plus humide, mais
verse néanmoins en pente douce vers la forme ovoïde.
|
![]() |
|
Des images récentes montrent que la petite trace ovale a dû être
dérochée et mise en culture, au droit, le talus est actuellement envahi
par un roncier.
L'ensemble de la parcelle est en déclivité douce vers le bourg et la Gartempe, au nord. Deux traces rectilignes se recoupent à angle droit : repérage par pointes de flèches affrontées. Tout bien pesé, s'agissant d'un petit vicus, on peut assez bien voir là les restes les restes d'un théâtre rustique. Et ne cherchons pas des restes de gradins . . . au mieux, ils auraient été pu être creusés dans la terre du versant ou tout simplement établis en bois. A la réflexion, l'idée ne me paraît pas trop farfelue ! A moins que vous ne connaissiez
d'autres endroits mieux conformés, semblablement situés
un peu à l'écart du vicus antique mais
néanmoins pourvu d'un accès facile, pour tenir ce
rôle hérité de la revendication populaire romaine
et gallo-romaine connue : "du
pain et des jeux !" ?
|

Nous avons tout dit sur la trace de la voie antique qui
traverse la grande prairie au centre de l'image : on remarquera
ça et là, nous l'avons dit, l'angulation des limites de
jardins tantôt orthonormées sur la rue actuelle des
Fossés à gauche, tantôt sur la trace de la voie
antique.
En totalité ou en partie, les rues du vicus antique apparaissent encore dans la grande terre de culture qui s'étend sur la quasi totalité de la moitié droite du cliché. On distingue ainsi une première partie qui fut urbanisée et qui reste grossièrement trapèzoïdale, au contact du cimetière actuel. Disposée en axiale nord-sud la rue cardinale principale (cardo maximus) de ce quartier nord est bien définie depuis le gros arbre en boule du cimetière jusqu'à la proximité de l'angle d'une parcelle complexe au centre bas du cliché. Cet azimut est sensiblement de même valeur que celui de la voie antique à la même hauteur (donc située à distance par le travers exact). Au sud, la seconde partie urbanisée de forme grossièrement carrée, contiguë à la précédente, présente une rue cardinale à l'azimut sensiblement décalé et de la même façon apparemment calqué sur la portion de voie antique située par son travers. Les rues transverses, les rues décumanes, sont moins évidentes à situer.
Dans
le vaste quartier nord on peut distinguer un macule plus vert que
nous interpréterions volontiers comme une source peu profonde ou
l'arrivée d'une très ancienne adduction d'eau.
A partir de là l'étoile d'une distribution d'eau
semble irradier selon deux, trois, voire quatre directions au travers
des habitations antiques. Ce réseau se signalerait
de nos jours au travers des matériaux d'effondrement
capables d'entretenir encore une certaine capillarité.
Au demeurant la description que nous donnons de ce réseau hydraulique fossible n'est pas sans rappeler celui que nous avons évoqué à la page précédente à proximité de la ferme de Mérigot. |
| Incrustée dans les espaces d'habitat, sensiblement
rectangulaire, une
parcelle prolonge le plateau du vicus. Elle
est pourvue d'un petit appendice également rectangulaire,
au sud, dominant la voie antique qui accentuait son déperchement
à
cet endroit pour atteindre progressivement le niveau de la Gartempe. Selon les clichés, la partie principale présente des partitions internes et au hasard des aléas météorologiques, son pourtour est marqué par une large bande vert-foncé que l'on peut interpréter comme une remontée d'humidité au droit d'anciennes et importantes fondations de murs pillés jusque dans leurs fondements profonds. Proche de la zone urbanisée et située en bordure de la voie romaine majeure, on peut sans grand risque indiquer cet espace comme le site du forum antique, espace civil, administratif et religieux de toute agglomération romaine et gallo-romaine. |
|
Une
dernière image pour mettre en valeur la belle rue diagonale qui
traverse Rancon : une rue qui serpentait encore il y a quelques
années en dehors de toute logique urbanistique : c'est la rue des Marchants-de-Vin mais on l'appelait encore il
n'y a pas si longtemps "la rue Grande" (voir les vignettes).
|



|
De droite à gauche la
voie romaine principale se déperchait vers la Gartempe sur le
fond des jardins et des près de maison. Les dépôts
d'épierrement de la chaussée ont été
rassemblés en murets pour gagner de l'espace agricole.
Au droit des moutons venait finir
l'avancée d'un possible forum : un travail d'archéologue
pourrait décider si nous voyons ici un parement de mur antique
ou un simple dépôt (entre repères 1 et 2 :
photo et panneau situés plus haut).
Sur la vieille prairie laissée
en repos depuis quelque temps, un tapis d'orties a refait surface
à l'aplomb de la chaussée antique : cette plante montre
une forte affinité pour les terres qui ont subi dans un
passé - même très lointain : 2000ans - et de
façon prolongée, une forte imprégnation de
déjections et de rebuts d'origine humaine et animale. Dans le
cas présent, une remise en culture ferait disparaître
l'indice jusqu'à la prochaine déprise agricole.
Dans beaucoup de cas, la présence d'espèces végétales très ciblées est plus pertinente qu'une fouille de surface qui ne montre que de cailloux remués par des siècles d'activité agricole. Nous avons largement signalé ce phénomène peu connu. Il reste malheureusement,
venant de l'histoire antique de notre région,
de moins en moins de choses pertinentes à reconnaître et à montrer, par suite de l'évolution des pratiques agricoles et du développement des habitats. |


|
|
|
|